négaWatt livre son analyse des scénarios électriques de RTE

NégaWatt livre son analyse des scénarios électriques de RTE

NégaWatt s’est penchée sur les scénarios électriques de RTE à l’horizon 2035. L’association estime que la question centrale est de savoir si les renouvelables s’ajouteront ou remplaceront la production nucléaire.

Energie  |    |  Philippe Collet
L’article original ici

Les scénarios présentés début novembre 2017 par RTE s’appuient tous sur le développement plus ou moins rapide des renouvelables. La question est de savoir si le développement des renouvelables se substituera au parc nucléaire ou s’il viendra s’y ajouter, estime l’association négaWatt qui a publié le 11 janvier une note tirant les enseignements des travaux de RTE. L’association déplore que « l’effervescence médiatique autour de cette publication [n’ait] malheureusement mis en évidence qu’une supposée impossibilité de respecter l’objectif de 50% de nucléaire en 2025 tout en contenant les émissions de CO2« .

Deux grandes perspectives

 
Il est possible de ne pas prolonger le parc nucléaire de façon à s’approcher de l’objectif de 50% en 2025 sans pour autant augmenter les émissions de CO2  
NegaWatt
 

Selon négaWatt, les scénarios de RTE ne peuvent être réduits au discours tenu par le gestionnaire du réseau de transport électrique et la décision prise par Nicolas Hulot le jour de leur publication. D’autres voies existent, estime négaWatt qui considère que les quatre scénarios de RTE dressent deux grandes perspectives.La première, celle d’un développement des renouvelables venant se substituer à une partie du parc nucléaire. NégaWatt classe deux scénarios dans cette catégorie : le scénario « Watt » qui propose de fermer les réacteurs nucléaires dès leur quarantième anniversaire et le scénario « Hertz » qui reporte à 2030 la réduction de la part du nucléaire à 50%. Le premier aboutit en 2035 à la fermeture de 54 réacteurs et à des puissances installées de 67 GW pour l’éolien et 48 GW pour le photovoltaïque. Le second se traduit par la fermeture de 27 réacteurs et des capacités installées de l’ordre de 50 GW pour l’éolien et 36 GW pour le photovoltaïque. En outre, 10 GW de centrales au gaz seraient installées et les centrales au charbon fermées, permettant une légère baisse des émissions de CO2 françaises.

La seconde perspective est celle d’un développement des renouvelables venant plus ou moins s’ajouter au nucléaire. Cette approche vient « renforcer une surcapacité évacuée via une forte croissance des exportations », explique négaWatt. Il s’agit du scénario « Ampère », construit sur l’hypothèse d’une réduction de la part du nucléaire en fonction du développement des renouvelables (18 réacteurs nucléaires fermés en 2035 et 67 GW d’éolien et 48 GW de photovoltaïque installés), et du scénario « Volt » qui propose un développement des moyens de production en fonction des débouchés économiques (9 réacteurs nucléaires fermés en 2035 et 50 GW d’éolien et 36 GW de photovoltaïque installés en 2035).

Réduire la part du nucléaire et les émissions de CO2

NégaWatt tire cinq conclusions de ces scénarios. Tout d’abord, l’action sur la consommation électrique est déterminante. « Du fait d’une efficacité énergétique croissante et malgré l’apparition de nouveaux usages, comme le déploiement à grande échelle du véhicule électrique, RTE montre que la consommation d‘électricité ne va plus augmenter », rappelle l’association. Elle en déduit que le développement des renouvelables en France ne peut pas se faire sans une réduction du parc nucléaire. Pour renforcer les économies d’énergie, négaWatt suggère de porter l’effort sur la consommation d’électricité dans le tertiaire, et de déployer un programme de rénovation performante de logements classés F ou G et chauffés à l’électricité.

Autre conclusion de négaWatt : la fermeture de réacteurs peut se faire sans hausse des émissions de CO2. Certes, le scénario « Ohm », qui respecte l’objectif de réduction à 50% de la part du nucléaire en 2025, aboutit à une augmentation de 22 millions de tonnes des émissions de CO2, mais c’est parce qu’il se base sur la variante haute de la consommation d’électricité. Dans sa version basse, la hausse des émissions de CO2 est ramenée à 13 millions de tonnes. En outre, le scénario de fermeture de tous les réacteurs à 40 ans (scénario « Watt ») « se traduit par une légère baisse des émissions de CO2 en 2025, tout en atteignant à cette échéance 55% de nucléaire dans le mix électrique ». Sur ce sujet, négaWatt rappelle aussi que RTE ne prend en compte que les émissions du secteur électrique, sans étudier les émissions évitées dans d’autres secteurs, notamment les transports. « Il est possible de ne pas prolonger le parc nucléaire de façon à s’approcher de l’objectif de 50% en 2025 sans pour autant augmenter les émissions de CO2« , conclut l’association.

Prolonger le nucléaire n’est pas une option facile

Les deux conclusions suivantes concernent spécifiquement le nucléaire. Tout d’abord, « les scénarios de RTE montrent qu’un arrêt à l’échéance des 40 ans de tous les réacteurs est techniquement 
possible sans que l’approvisionnement électrique ne soit mis en défaut ». En effet, les scénarios montrent que les renouvelables peuvent couvrir entre 40% et 70% du mix électrique. Ensuite, « la prolongation du parc nucléaire n’est pas l’option facile qu’elle semble être ». L’association estime que les scénarios de RTE s’appuient sur une hypothèse trop optimiste : la réalisation en 6 mois des travaux de prolongation de chaque réacteur. Dans le même ordre d’idée, RTE s’appuie sur une hausse des exportations pour absorber la hausse de production. « Si ce niveau exportateur ne se réalise pas, le risque est de dégrader fortement la performance économique des réacteurs nucléaires français », estime l’association.

Enfin, la cinquième conclusion concerne les renouvelables, que l’association qualifie d’« option sans regret ». « Les énergies renouvelables électriques sont d’ores et déjà économiquement compétitives dans certains cas, et vont le devenir progressivement dans tous les cas », explique-t-elle. Leur développement en France est donc réaliste et fait sens économiquement.

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